lundi 30 octobre 2017

Suspiria (D. Argento, 1977)




Extraordinaire film de Dario Argento, qui, sans chercher à dérouler une narration rigoureuse, plonge le spectateur dans une étrange poésie macabre, à l’atmosphère cauchemardesque.
Chaque séquence du film est faite d’une explosion de couleurs, de décors géométriques outranciers et de sons étranges qui créent une ambiance tour à tour terrifiante, angoissante, fantastique, baroque.
D’emblée, dans l’orage qui accueille l’héroïne, Argento pose les bases de l’angoisse, il file rapidement vers l’horreur avec le premier double meurtre qui arrive très vite – double meurtre incroyablement baroque et décalé – et le film se poursuit ensuite avec un ton fantastique qui s’affranchit de toute rigueur logique. C’est qu’Argento s’amuse de raccords très voyants mais difficiles à décrypter (on passe sans crier gare d’une pièce à une autre, sans comprendre les lieux) ou d’ellipses perturbantes. Et, bien entendu, le rouge pulsionnel qui envahit les décors (au milieu d’aplats de jaune, de violet, de bleu), accueille bientôt les premières éclaboussures de sang.



On retrouve dans le film les grandes lignes d’un conte morbide (l’action se passe à Fribourg, contrée des frères Grimm), et cette école de danse, sombre et inquiétante, où une sorcière célèbre ses cultes démoniaques, n’en finit pas d'envoûter et d’angoisser Suzy (Jessica Harper, parfaite avec ses yeux de biche apeurée).
On ne se soucie donc guère du réalisme de l’histoire (il ne s'agit pas de comprendre précisément qui tue tel ou tel personnage à tel ou tel moment de l’histoire), ce qui compte, ce sont les violets profonds des murs, les couloirs violemment éclairés de lumières tantôt chaudes et tantôt froides, les ombres derrière le paravent, les éclairs de l’orage qui éclate et les murmures incessants des sorcières qui hantent ce lieu maudit.

S’inspirant à la fois des frères Grimm, de Fellini (pour cette ambiance onirique qui laisse s’échapper le fil de la narration) ou de Mario Bava (on pense au baroquisme de Six femmes pour l’assassin), Argento articule son film entre giallo, fantastique et horreur. Et Suspiria laisse dans la tête du spectateur une angoisse prenante, des explosions de couleurs, comme autant d’aplats vifs et d’éclats soudains et, toujours, cette musique entêtante, incroyable ritournelle emplie des soupirs terrifiants des sorcières.



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