Très
beau film de Pasolini qui retrace la vie de Jésus en suivant assez précisément
l’évangile citée en titre. Il s’appuie sur des acteurs non professionnels
(en particulier le jeune Enrique Irazoqui dans le rôle du Christ), utilisant sa
mère dans le rôle de la Vierge Marie âgée ainsi que d’autres parmi ses proches.
Pasolini
donne ainsi à son film une teinte très néoréaliste, les paysages (ceux de
l’Italie du Sud) secs et vides, les décors très simples, le dépouillement du
film le rapprochant clairement de la période néoréaliste, focalisée sur la
pauvreté de l’Italie au sortir de la guerre.
Cette
esthétique très dépouillée convoque une esthétique issue de la peinture
italienne de la Pré-Renaissance ou des débuts de la Renaissance : on pense à Giotto ou à Masaccio, avec des représentations
discrètes, sobres, loin de tout éclat.
Joachim parmi les bergers (Giotto, église de l'Arena, Padoue, 1303) |
Le Paiement du tribu (Masaccio, chapelle Brancacci, Florence, 1424) |
A
contrario de ces moments où il semble prendre du recul, Pasolini n’hésite pas à
filmer gros plan sur gros plan, zoom sur zoom, décadrant le visage de
Jésus, scrutant l’humanité des disciples, des auditeurs. Et, en écho à la
sobriété du Christ, Pasolini met en avant sa parole : c’est nettement par
le verbe que Jésus agit, prêchant continuellement. De même que c'est par le verbe qu'il réapparaît d'abord.
Le
Jésus de Pasolini apparaît donc infiniment humain, ne le montrant guère comme
« fils de Dieu ». Mais Pasolini élève très haut cette humanité,
tellement haut qu’elle rejoint une transcendance, malgré tout. Comme si, pour
le réalisateur italien, Jésus ne venait pas des cieux mais pouvait bien y parvenir
malgré tout.
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