lundi 2 juillet 2018

Pattes blanches (J. Grémillon, 1949)




Très beau film de Jean Grémillon qui parvient à relier deux aspects de son talent : d’une part la description d’un milieu social (ici un petit village de Bretagne, dont il brosse plusieurs portraits de villageois), et d’autre part un ton poétique et parfois même onirique qui déborde parfois de l’image. Il assemble en fait la description sociale fine telle qu’on la trouve dans Le Ciel est à vous avec la poésie folle de Daïnah la métisse.
Partant d’un ressort classique (l’arrivée dans le petit village d’une jolie femme qui déclenche les passions), Grémillon s’appuie sur des personnages complexes et contrastés, bien souvent solitaires et rejetés (Julien de Kériadec, Maurice ou Mimi) et qui construisent un enchevêtrement de destins (puisque le passé – avec les demi-frères qui se haïssent – n’est jamais loin). Le plaisir du film vient aussi de l'excellente distribution, avec notamment Fernand Ledoux qui compose un personnage à la fois dur et pitoyable, esclave de son amour. Suzy Delair est elle aussi remarquable, tout à la fois mordante et fragile, superficielle et profondément touchée.



Grémillon joue magnifiquement des extérieurs, montrant la solitude des uns, les jalousies des autres, les ressorts complexes qui unissent les personnages. Certaines séquences sont magnifiques, parfois emplies de poésie (les déambulations dans le château aux pièces recouvertes de paille) ou d’une pulsion de vie baroque et onirique (l’extraordinaire climax de la scène de mariage qui vire au conflit dans la lande). Ce mélange de motifs, souvent difficile, est ici parfaitement réussi.

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