lundi 24 juin 2019

Exotica (A. Egoyan, 1994)




Envoûtant film d’Atom Egoyan, empli de mystère et qui ne dévoile que très progressivement les liens complexes qui unissent les personnages et les raisons profondes qui les poussent à agir.
Dans ce climat intrigant, Egoyan situe le cœur pulsionnel du film dans le club Exotica, la boîte de nuit où se rend si souvent Francis (très bon Bruce Greenwood) et où il noue une relation étrange avec une jeune danseuse. Dans ces différentes séquences de la boîte de nuit, Egoyan construit une atmosphère sensuelle et chaude, à la fois luxuriante, charnelle et mystérieuse, portée par les psalmodies douces d’Eric (Elias Koteas) et la musique lancinante de Leonard Cohen.



Et, progressivement, on comprend que tout le récit n’est qu’un jeu de regards et d’observations (ce que la séquence d’introduction dit parfaitement), de souvenirs ancrés avec lesquels il faut vivre, et où aucune relation n’est innocente : ni celle de Francis et de la danseuse, ni celle de Francis et Eric ; Eric qui manipule Francis ; Francis qui manipule Thomas Pinto.
Et l’on découvre, tout aussi progressivement, à mesure de l'envoûtement du film, les traumatismes portés par chaque personnage, traumatismes qui, à la fois, les accablent et les relient indéfectiblement les uns aux autres.

La construction du film montre une rare intelligence cinématographique – qui va bien plus loin qu’un simple scénario bien ficelé – et une maîtrise totale des jeux d’images : Egoyan joue de ressorts cinématographiques pour montrer sans dévoiler, pour épaissir ses personnages au fur et à mesure, pour mettre en scène l’ambiguïté d’une relation. Il fait résonner, à l’image, la luxuriance douce du club avec la boutique étrange, sombre et moite de Thomas ; il construit un rythme lent et charnel mais sans cesse intrigant et conduit à sa guise le spectateur dans le labyrinthe de son film.

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