jeudi 14 novembre 2019

La Belle de Saïgon (Red Dust de V. Fleming, 1932)




Bel exotisme dans ce film hollywoodien réussi, où Clark Gable – en aventurier macho charmeur – construit parfaitement son personnage, qui prend une belle dimension sacrificielle en fin de film.
Si le film démarre avec des personnages archétypaux (l’aventurier, la prostituée blasée et la femme distinguée perdue au milieu de la jungle), le film va s'amuser à les confronter avec un plaisir évident et deux d'entre eux (Dennis et Vantine) gagnent une certaine noblesse de caractère en fin de film.
La joyeuse liberté du pré-code explose joliment dans plusieurs séquences à la tension érotique et sexuelle étonnante, où Jean Harlow fait merveille en prostituée blonde délurée. Les dialogues – certains tout à fait grivois – autant que certaines suggestions à l’image (le bain de Vantine) sont très crus et disparaîtront sagement quelques années plus tard. Et l’attitude même de Vantine, autant que ses robes très légères, ne seront bientôt plus possibles à Hollywood, code Hays oblige.
On pourra trouver l'habituel triangle amoureux un peu déséquilibré (on a du mal à voir Vantine aimer Dennis avec la même passion que Barbara), mais le ressort de l’amour sincère, loin de la frivolité de Vantine, joue sur l’assemblage des contraires avec la rencontre entre ce rude macho qui a roulé sa bosse et la bourgeoise fraîchement mariée, à la préciosité fragile .
Le film est aussi une belle illustration de l'opposition entre deux mondes, qui se mélangent presque, mais qui, finalement, restent chacun à leur place : Barbara s'en retourne avec son mari et Dennis retrouve les bras de Vantine. Tandis que s'offre à lui l'amour profane, incarné par Vantine, prostituée dévergondée, Dennis goûte presque, avec Barbara, inaccessible et précieuse, à l'amour sacré, qui ne lui est pas destiné. Et le faux happy-end rétablit l'ordre des choses.
Et le film distille son lot d’exotisme, au milieu de ce jeu sensuel et érotique comme on n’en verra plus pendant des décennies et réserve une fin teintée d’amertume.



John Ford fera avec Mogambo un remake célèbre (toujours centré autour de Clark Gable) qui, s’il a d’autres atouts, est bien loin de montrer la même tension érotique ou sensuelle de certaines séquences de La Belle de Saïgon.

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