jeudi 24 décembre 2020

L'Ouragan (The Hurricane de J. Ford, 1937)




Incroyable et méconnu film de John Ford qui, loin des westerns ou de l’Irlande, se tourne du côté des îles, entre Tahitiens et Français.
Il décrit (avec un zeste de naïveté) un univers paradisiaque puis il met en place une injustice, de plus en plus violente, lorsque Terangi est progressivement frappé par le destin. Et, quand Terangi semble définitivement condamné (ou bien à la prison pour des années ou bien à l’exil loin des siens), l’ouragan du titre se déchaîne sur l’île.
En une longue séquence incroyable, les vagues viennent peu à peu déferler sur les maisons, déraciner les arbres, renverser les bateaux. Et l’église, même, que l'on pense hors d’atteinte, se fera balayée. Certains s’attachent aux arbres, d’autres se réfugient dans des pirogues, d’autres encore chantent et prient dans l’église, dont il faut bientôt soutenir les murs qui menacent de s’effondrer, sous les coups de butoir des vagues.
La puissance de cette séquence surprend : on tient là   dès les années 30   un film catastrophe qu'il sera difficile d'égaler, à la fois par son sens de l'absolu (c'est tout un univers qui est détruit) et, bien plus encore, par l'inversion qu'il propose : les films catastrophes montrent d'ordinaire une destruction qu'il s'agit d'empêcher ou à laquelle on survit péniblement, dans un monde dévasté. Ici, dans L'Ouragan, cette destruction est la condition même d'une nouvelle vie. En effet, par ce Déluge de fin du monde, tout est balayé, sauf Terangi et les siens, accrochés à un arbre – tel Noé réfugié dans son arche – ainsi que quelques barques miraculées. Les autres habitants meurent, comme autant de victimes expiatoires. Mais, au lendemain du Déluge, Terangi, absout, pourra désormais vivre heureux auprès des siens.


En fin de carrière, Ford reviendra sur les îles, dans La Taverne de l’Irlandais, mais loin des châtiments divins et avec un tout autre ton, celui des amitiés viriles et complices.



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