Dans cette nouvelle fantaisie historique, Sacha Guitry, habile
conteur d’ordinaire, passe un peu à côté de son Napoléon, ne disant que bien peu de choses, étrangement, du
personnage et de son incroyable parcours. Il propose une suite de clichés,
collés artificiellement par la narration qu’il prend en charge (à partir du
rôle de Talleyrand, déjà étrenné dans Le Diable
boiteux), mais la sauce ne prend pas et la distance un peu désinvolte de Guitry ne parvient pas à construire un récit unique de cette suite d’images.
Qui ne connaît
pas Napoléon n’apprendra pas grand-chose et, en tous les cas, ne pourra rien y
comprendre. On ne voit qu’à peine les victoires militaires, guère plus les
défaites (la retraire de Russie est inracontable dit-il), la première
abdication est un mystère. Les défenseurs de Napoléon verront passées sous
silence les coalitions qui l’ont forcé à se battre ou les parties d’échecs
brillantes d’Austerlitz ou Ulm ; ses détracteurs ne verront pas les champs couverts de morts d’Eylau, de Wagram ou de la campagne de Russie. Et le budget du film ne permet guère
de montrer les mouvements de troupes, la masse de la Grande
Armée, les charges de cavalerie et autres canonnades. C’est un peu une version
côté salon de Napoléon, que l’on voit dans son bureau, sous sa tente ou à
butiner autour de jolies dames.
En revanche on
s’amuse de la distribution. C’est d’abord un exemple assez rare de film où deux
acteurs jouent successivement le même personnage adulte. Mais il est vrai qu’il
y a une contradiction entre l’image du Bonaparte du pont d’Arcole – le visage
fin et les cheveux longs et raides – et l’image postérieure de l’empereur, avec
le visage rond et la mèche de cheveux. Guitry change alors tout à coup d’acteur
pour marquer le passage de Bonaparte à Napoléon, passant sans hésiter de Daniel
Gélin à Raymond Pellegrin. Ensuite on se distrait en repérant la multitude d’acteurs
qui ont un petit rôle, parfois le temps d’une scène ou de quelques plans (de
Danielle Darrieux à Orson Welles, en passant par Stroheim ou Jean Marais).
Daniel Gélin est Bonaparte... |
...et Raymond Pellegrin est Napoléon |
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