samedi 17 avril 2021

Gandhi (R. Attenborough, 1982)



Ce fameux film de Richard Attenborough, s'il fut couvert d'Oscars, laisse un peu sur sa faim. Certes il retrace les grands traits de la vie de Gandhi, certes Ben Kingsley est remarquable dans le rôle-titre, certes le message sur la non-violence, sur la  dignité d'un individu et d'un peuple sont remarquables. Mais, derrière l'hagiographie – qui ne laisse guère de place pour un regard critique sur Gandhi – il ressort bien peu de choses en définitive : à se fixer uniquement sur Gandhi, on ne comprend pas tout ce qui se passe de ce moment clé de la décolonisation de l'Inde.
Gandhi nous dit qu'un jour les Anglais comprendront qu’ils ne sont pas chez eux en Inde et qu’alors, ils partiront. Et un jour, effectivement, ils partent. Mais on ne comprend pas ce revirement chez les Anglais qui, finalement, acceptent de partir. On aurait voulu voir, à l'image, en scrutant des visages, des atmosphères ou des silences, en montrant la dissonance entre l'Anglais et l'Indou, ce qui se passe chez les Anglais, ce qui les convainc, ce qui les convertit. Mais Attenborough ne s’intéresse pas vraiment à autre chose que son personnage, sur lequel il reste fixé en permanence
et qui n’est même pas un prétexte (à l’exploration de l’Inde, à la décolonisation, à comprendre les rapports humains, etc.) : il n’en a que pour Gandhi.
Et, à ce manque sur l’attitude anglaise, répond un autre manque, tout aussi fondamental, et qui montre combien Attenborough ne fait qu’effleurer son sujet : en début de film, Gandhi, avocat fraichement sorti de l'université de Cambridge, découvre le violent racisme de l'Afrique du Sud. Et il se bat pour la justice mais s'il le fait, c'est en tant que citoyen britannique, puisque, pour Indien qu'il puisse être, il n'en est pas moins sujet de Sa Majesté et a donc les mêmes droits. Or, quand il retourne en Inde, Gandhi ne se considère plus comme citoyen anglais mais il lutte pour l'indépendance de son pays, déclarant que les Anglais sont étrangers. Ce changement de perspective, que l’on ne comprend guère, aurait été passionnant à suivre, puisqu’il est le miroir du trajet que devront parcourir les Anglais.
On se souvient que, dans La Croisée des destins, le personnage joué par Ava Gardner incarnait l'Inde, avec ses contradictions et ses tiraillements ; ici Gandhi ne représente rien d'autre que Gandhi.
On préfère l’angle de vue que choisit Attenborough dans Cry Freedom, où le personnage central du martyr – Steve Biko – laisse la place au journaliste qui va utiliser cette figure pour dénoncer l’apartheid.
Quand à Ben Kingsley, si sa performance est mémorable, on le redira une nouvelle fois : le mimétisme n'est jamais, pour un acteur, une si grande performance. Imiter un personnage existant, même parfaitement, est toujours plus simple que de le créer.

 

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