Très grand film (1) de G.W. Pabst, dont la maîtrise et l’humeur
très sombre envahissent chaque plan. La rigueur absolue de la construction se
manifeste à chaque instant, avec des plans nets et très travaillés, avec des mouvements
de caméra précis et envoûtants, avec des jeux de changements d’angles de vue
perturbants, avec des contrastes tout en clairs-obscurs.
La noirceur du film s’exprime aussi bien dans cette mise en
scène très formelle que dans l’histoire elle-même, qui nous fait naviguer de la
pègre aux loqueteux, en passant par des policiers corrompus ou des prostituées.
Aucune onde positive ne traverse l’écran : il n’y a ici que des renvois
aliénants d’un monde obscur, noir, qui est comme une face cachée du monde apparaissant
au cœur du plan. Les décors emplis d’ombre, d’entrepôts, de caves ou de
cellules aux barreaux lourds façonnent une atmosphère où même un repas de
mariage devient une farce grotesque, avec cet étalage d’objets volés et de
victuailles. Et l’on pense à Stroheim devant cette bande de voleurs
patibulaires qui s’esclaffent.
Et, bien entendu, enveloppant tout cet attirail étrange et sombre d’une humeur triste, les chansons que Pabst essaime ici et là – à la fois comme des apartés et comme une sorte de commentaire off – achèvent de donner une noirceur terrible au film, tant le cinéma ne nous a pas habitués à des musicals sombres et cyniques.
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