vendredi 19 décembre 2014

Sin City (2005) et Sin City : J'ai tué pour elle (Sin City : A Dame to Kill For, 2014) de R. Rodriguez et F. Miller




Sin City est un film original de prime abord mais, une fois la surprise passée, il devient rapidement lassant.
Il est à peu près unique dans son genre puisqu’il adapte un univers de BD comme aucun autre, bien loin des adaptations hollywoodiennes habituelles qui fleurissent sur les écrans ces dernières années (de Spiderman à Iron Man). Ici le style très particulier de Miller, revisité pour l’écran, dans un style un peu rétro-futuriste pourrait-on dire, joue avec des effets très BD et des noirs et blancs rehaussés de quelques pointes de couleurs choisies. Et l’image passe d’un monde numérique à un monde graphique, superposant le tout, jusqu’à l’abstraction. Ainsi, sous des dehors rudimentaires (avec des traits de crayons simples et des aplats de noirs et blancs), le film consacre le règne du numérique le plus moderne.


Le problème est que le seul intérêt du film réside dans l'apparence de l’image. De sorte que, une fois passée la surprise de la découverte (ce qui, tout de même, vient assez vite), on découvre qu’il n’y a rien derrière ce style. En effet, l’histoire reprend quelques grandes lignes du film noir (les femmes fatales, les gars rudes qui vident une bouteille en fumant une cigarette accoudés au bar, une voix off grave qui insiste sur la fatalité des événements, etc.) mais il ne va pas beaucoup plus loin et semble n'avoir jamais rien à dire.
Le film s’étire en longueur, en multipliant les héros et les histoires emmêlées (l’ombre de Tarantino, qui sera nettement cité dans le second opus, rôde) mais cela est très répétitif : c’est toujours la même approche, et tout cela ne mène à peu près nulle part. Cette multiplication des personnages entraîne, de facto, leur manque d’épaisseur : ils sont comme en deux dimensions – celle de la planche à dessin d’où ils sont issus – et jamais on ne parvient à s’intéresser à eux.
On comprend alors que le passage à la BD n’est que le prétexte à multiplier les barbouillages de sang (reprenant, là aussi, le goût pour la chose du Tarantino de Kill Bill), les décollations, les tranchages de membres et autres gerbes rouges qui viennent s’étaler sur les murs. Bien entendu il n’y a rien derrière tout ça, l’histoire en elle-même n’étant d’aucun intérêt.
Du coup on aurait apprécié que le film se réduisît à la longueur d’un clip : cent vingt minutes pour raconter si peu et avec si peu d’émotion, c’est au moins cent minutes de trop.

Mais au fait, il n’y a pas d’œil arraché dans ce film ? Pas d’inquiétude, le deuxième épisode assure la relève. C’est reparti, donc, avec Sin City : J’ai tué pour elle.
Quand la nouveauté d’un film s’épuise au bout de dix minutes pour laisser place à une redondance lassante, on ne peut guère espérer une suite intéressante. Sur la même esthétique, le récit tourne donc à nouveau en boucle. On pourrait continuer à l’infini, à faire arriver en ville un nouveau héros, lui faire rencontrer une autre femme fatale et le voir se castagner avec les sbires de tel ou tel caïd de la pègre qui a fait du mal à sa belle : le film pourrait durer deux fois plus longtemps ou être deux fois plus court sans qu’il n’y ait rien de plus ni rien de moins.


Bien sûr, tout cela est au énième degré, mais il n’en reste pas moins que cette profusion d’hémoglobine est sans doute réservée aux fans, qui, n’en doutons pas, seront ravis devant cet apparat un peu vain : ce n'est pas beaucoup plus qu'une boucherie savamment présentée.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire