Ce premier film mettant en scène Rambo est loin
d’être mauvais. On a tendance à l'oublier parce qu'il a enfanté des suites qui
sont devenues des caricatures de ce que le cinéma
commercial américain peut faire de plus affligeant.
Mais ce premier opus tient la route. Bien sûr
on n’échappe pas aux caricatures. Le pauvre Rambo n’a pas de chance d'être mis
entre les mains d'un policier qui est un abruti fini et violent (dommage pour
Rambo, mais heureusement pour le scénario : voilà Rambo énervé !). Le
personnage du shérif est plus intéressant et aurait mérité d'être creusé un
peu : s’il ne veut pas de Rambo dans sa ville, nous dit-il, c’est à la demande
des citoyens qui ne veulent pas d'étrangers dans leur petit patelin. L’intéressante
question de savoir comment les vétérans du Vietnam (ou de tout autre conflit)
peuvent réintégrer la société passe vite à la trappe. A tel point qu’on n’en
sait rien en fait : on ne voit jamais Rambo croiser un concitoyen ;
on comprend juste que, d’après le shérif, il n’est pas bienvenu. Certes mais
c'est un peu court : l'évocation d’une Amérique conformiste qui n’aime pas
l’étranger est donc on ne peut plus légère.
Mais, comme Rambo s’est échappé, toute
réflexion est vite hors de propos : il faut rattraper le fauve. On tombe
alors dans le film d’action, certes efficace, mais typique des années 80, avec
Rambo qui se camoufle, qui se recoud, qui chasse, bref qui survit avant de
contre-attaquer et de tout démolir.
C’est dommage car le film promettait
davantage, en abordant le retour des vétérans dans l’Amérique et la façon dont
la société les considère. Rambo
s’inscrit alors complètement dans la lignée du Voyage au bout de l’enfer, sur la plaie
vive qu’est le Vietnam (le film, en ce sens, est davantage un film de la fin des années 70 qu’un film des années 80, bien qu’il date de 1982) ou même de Capitaine Conan sur ces soldats qui sont de véritables machines de guerre complètement asociales et ingérables une fois le conflit terminé (et qui rouillent comme un char au fond du jardin, nous dit Conan).
Rambo représente aussi une belle image du héros qui revient de la Frontière, qui y a affronté la sauvagerie, et qui ramène avec lui une part de sauvagerie, qui ne cessera de le hanter. Si sa puissance de frappe submerge tout dans un espace de Frontière (la forêt est son royaume comme l'apprennent le shérif et ses hommes) il est contraint, par ailleurs, de vivre à l'écart de la société des hommes civilisés. Il est ainsi une évocation moderne, transposé dans une Amérique des années post-Vietnam, d'Ethan Edwards, dont la connaissance de la Frontière lui permet de retrouver Debbie mais l'oblige à repartir, ne pouvant rester dans la civilisation. Rambo, lui non plus, ne saurait se civiliser normalement : ensauvagé (indianisé, même, avec son look ou ses techniques de chasse) il est par définition marginal.
Après Rocky, Sylvester Stallone s’offre un second personnage qui déborde largement le cinéma pour s’installer dans l’imagerie américaine populaire. On sait combien l’aura du personnage est phénoménale, à tel point que des guérilleros prendront le look de Rambo (bandeau, débardeur).
Après Rocky, Sylvester Stallone s’offre un second personnage qui déborde largement le cinéma pour s’installer dans l’imagerie américaine populaire. On sait combien l’aura du personnage est phénoménale, à tel point que des guérilleros prendront le look de Rambo (bandeau, débardeur).
Les suites affligeantes (à commencer par Rambo 2), illustrent simplement l'exploitation de filons par les producteurs : le
but est de gagner de l'argent, avec une totale indifférence sur la qualité des
films, leur vraisemblance ou encore sur leur symbolique (en pleine Amérique
reaganienne, voilà une image bien caricaturale de l'Amérique impérialiste et
guerrière).
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