Film étrange et iconoclaste, La Mort a pondu un œuf commence comme un giallo avant de prendre des chemins de traverse. Le film s’écarte rapidement des codes du genre (après une scène d’ouverture très typique mais parfaitement filmée) et, sur fond d’élevage de poules en batterie, déroule un scénario étrange,
Le film, en
effet, fait feu de tout bois : il est question à la fois de politique
(avec la mécanisation de l’usine qui rend les ouvriers inutiles), de recherches
génétiques (avec la création de poulets sans tête !), d’un mari insatisfait,
de trahisons répétées (la petite nièce qui passe d’un amant à un autre),
d’héritage industriel, le tout sur fond de meurtres de prostituées. Certains
accents du film sont étonnamment annonciateurs de maux industriels à
venir : par exemple les recherches biologiques pour créer un poulet avec
moins d’os et plus de viandes. Le tout avec un soupçon d’absurde et d’horreur.
Et Giulio Questi
coule ce scénario abracadabrantesque dans une forme sans cesse surprenante qui
ressemble à un cinéma expérimental ou avant-gardiste (mais très réussi) :
le film joue de gros plans improbables, d’inserts curieux, de mouvements de
caméra surprenants, d’angles de vue outranciers, de raccords dissonants, d'images délirantes (les poulets dans des classeurs). Et une
musique parfois complètement discordante, avec des variations jazzi
omniprésentes, enveloppe le tout et donne une tonalité unique à l’ensemble. Le
film a ainsi des accents godardiens ou même parfois lynchiens avant l’heure, avec une image moins bien
léchée, mais tout aussi étrange et qui confine à l’horreur (les meurtres ou les
poulets sans tête, violemment écrasés).
Derrière une
certaine froideur, le ton est volontiers ironique (et va jusqu’à l’humour
noir). La métaphore du poulet en batterie est très riche (cette usine
caquetante évoque même, quelque part, l’usine de La Classe ouvrière va au paradis de Petri), de même que ces poulets
sans tête, qui horrifient Marco (excellent Jean-Louis Trintignant, toujours
très bon pour interpréter des personnages renfermés, absents et brisés), mais
réjouissent, par ailleurs, tout le monde.
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