samedi 28 mars 2020

Spider (D. Cronenberg, 2002)




Extraordinaire film de David Cronenberg qui tisse une toile complexe autour de son personnage, Dennis « Spider » Cleg (excellent Ralph Fiennes), et prend le spectateur dans un entrelacs d'images qui sont des souvenirs, des délires ou des cauchemars ; oscillant entre le quotidien de Dennis, son passé d'enfant et ses fantasmes.
Cronenberg cherche à sonder l'inconscient de son personnage : il s'agit de plonger dans son esprit malade, tenter de lever son amnésie et pour cela retrouver l'origine de cette terreur enfantine qui le bloque depuis si longtemps. Le film correspond en quelque sorte à la séance de thérapie, étalée sur plusieurs jours, mise au point par le directeur de l'asile pour soigner Cleg. Spider rejoint alors, dans sa thématique, des films aussi divers que La Maison du Docteur Edwards, Marnie, La Vallée de la peur ou encore Shutter Island. C'est d'un traumatisme passé dont il s'agit et qu'il faut percer à jour.
La compréhension fine suppose de démêler les images qui relèvent de la réalité de Cleg, celles qui sont issues de son enfance, et celles qui sont de l'ordre du fantasme. La confusion entre sa mère, la prostituée Yvonne ou sa logeuse Mme Wilkinson, confusion entretenue à l'image où tout s'entremêle, est un exemple de ces constructions, tout droit issues du cerveau malade de Cleg et qu'il faut interpréter (de même la vision du jardin et de la cabane, qui recèle le secret caché de l'enfant). La toile d'araignée est donc tout autant celle qui est tissée au creux du cerveau de Cleg que la dispersion des indices par Cronenberg qui amènent le spectateur vers la révélation finale.
Le « What have you done ? » prononcé par Mme Wilkinson peut signifier la prise de conscience de Cleg : il peut être ramené à l'asile. C'est Cleg enfant que l'on voit dans la voiture, la révélation l'ayant brusquement ramené vers son passé. Cette dernière image fait écho avec le final du Messager de J. Losey, où là aussi un traumatisme d'enfant (d'un autre ordre) bloque un adulte, le rend incapable d'amour et bloque sa relation à autrui. Cette construction complexe, à coups d'images mentales qui construise un labyrinthe complexe mêlant réalité et fantasmes, rappelle aussi Mulholland Drive (le film ayant clairement des accents lynchiens).




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