Henry, portrait d’un serial killer prend le
contre-pied de bien des films américains sur les tueurs en série. En effet il ne
cherche ni à glorifier le tueur (comme dans Le Silence des agneaux qui lui prête une intelligence et un
raffinement supérieurs), ni à mettre en scène les meurtres (Seven), ni à montrer une enquête qui
avance pas à pas (Zodiac). Il ne
montre pas non plus des scènes de ville classiques où un halo brumeux entoure
un réverbère la nuit, alors qu’une femme au pas pressé se sent suivie. Non, ici il n’est pas question d’enquête ou de montées de tension et les
meurtres sont traités le plus souvent comme autant d’ellipses. Et
si c’est bien le tueur lui-même qui est scruté, il s’agit d’un tueur sans fard,
sans artifice, qui partage un moment un appartement avec Becky et son frère
Otis. Henry dont on ne saura à peu près rien (si ce n’est une histoire
familiale épouvantable), qui tue sans cesse mais sans motivation particulière
à l’encontre des victimes, qui sont choisies au hasard, comme elles se
présentent (tout le monde, ici, peut être une victime).
Le film plonge
alors dans un univers glauque, précaire et brutal, avec Otis, personnage
complètement immature et égoïste et qui sera initié au meurtre par Henry. On
verra Otis se repaître des films qu’il fait de ses propres meurtres. Certaines
séquences jouent d’ailleurs avec le spectateur qui croit assister à un meurtre
alors qu’en réalité il est du côté d’Otis, à regarder, comme lui, une cassette
vidéo du meurtre commis auparavant. Dès lors c’est le malaise qui envahit le
spectateur, qui a bien du mal à se distancier de cette ambiance d’autant plus
que, Otis étant, dans sa bêtise antipathique, encore davantage repoussant,
Henry devient le seul personnage auquel le spectateur puisse se rattacher.
Et le film
n’abordant guère la cause (ni la conséquence) de ces meurtres, il laisse le
problème complètement en suspens : Henry est en liberté et il tue, au
hasard des rues. Il n’y a pas le commencement d’une enquête qui puisse laisser
un espoir à la société qui héberge un tel monstre de s’en débarrasser.
Henry, portrait d’un serial killer par son
austérité éprouvante, son absence d’empathie, son absence de clefs, aussi, pour
comprendre les choses, se rapproche du Schizophrenia
de G. Kargl où, là aussi, un monstre donnait libre cours à sa folie.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire