Wong Kar-wai
filme un road-movie étrange, qu’il lance après une longue première partie
centrée sur le bar de Jeremy.
My Blueberry Nights reprend les
principaux motifs du road-movie : bien plus que la destination finale, ce
sont les rencontres faites en chemin qui sont décisives et le chemin parcouru
ramène au point de départ (on retrouve cette trajectoire circulaire du Magicien d'Oz ou de Apportez-moi la tête d'Alfredo Garcia). Dès lors c'est le cheminement
intérieur qui est la substance du road-movie : ici Elizabeth met des mois pour revenir à son point de départ et contempler sans tristesse
l'appartement à louer de son ancien amant. Elle peut alors traverser la route
et revenir dans le bar de Jeremy.
Et si la route
se prend à deux, ici les choses sont un peu différentes (Jeremy ne bouge pas de
son bar), mais Elizabeth lui écrit et il devient ainsi le compagnon de voyage,
confident muet sur lequel se reposer.
Elizabeth
devient alors témoin du monde, elle côtoie les tragédies humaines, s’apaisant à
mesure qu’elle s’ouvre aux autres.
Si ce premier
film américain recèle peut-être moins le charme secret de ses films hong-kongais,
il distille une étrange douceur triste, avec cette patte typique du réalisateur,
moins styliste ou maniériste que dans d’autres films, mais toujours capable de
donner à ses images à la beauté fulgurante une forte émotion, mêlant la tristesse et la douceur, l’illusion
et le désespoir. Wong Kar-wai reprend d’ailleurs – sous certains angles – des éléments
entrevus dans Happy Together. Et l’on
retrouve, comme si souvent chez lui, des personnages qui attendent, comme des
spectateurs qui suivent la marche du monde sans y prendre part.
Enfin, si la
musique est moins prenante que dans d'autres films du réalisateur, on notera le
délicieux arrangement à l'harmonica du fameux Yumeji’s Theme, venu tout
droit de In the Mood for Love et dont
on retrouve la douceur suave avec plaisir.
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