Once Upon a Time in… Hollywood réussit le paradoxe d’être à la
fois assez original pour un film de Quentin Tarantino et tout à fait typique de
son style. En effet, des quatre motifs qui habitent souvent ses films, Once Upon a Time en contient deux jusqu’à
plus soif et fait presque disparaître les deux autres.
Le premier motif
sur lequel il se concentre est cette façon de raconter, assez lente et calme,
avec peu d’actions, en se concentrant sur le trivial. Le film, alors, suit
cette linéarité tranquille (qui confine parfois, au détour d’une séquence trop
longue, à l’ennui) en accompagnant ses personnages, dans des moments qui ne
sont pas décisifs (ou à peine), rallongés, où Tarantino se plait à côtoyer ses
personnages. Ce travers célèbre rejoint par exemple les discussions sans fin, classiques du réalisateur, avec une narration qui ralentit terriblement et où Tarantino s’en remet à son
talent de metteur en scène ou à l’humour pour faire passer le temps.
Second motif
très présent : le cinéma de Tarantino reste résolument post-moderne, avec une intertextualité permanente, des citations, des
jeux entre le cinéma et lui, entre les personnages et les acteurs, entre son style
et celui qu’il cite. On notera par exemple l’amusant dénigrement du cinéma
italien dont les westerns ont eu tant d’influence sur Tarantino lui-même. A ce
titre, le choix de Di Caprio pour interpréter cet acteur qui devient
progressivement has-been peut surprendre : il y a là un double fond qu’aurait
pu travailler Tarantino en choisissant un acteur devenu has-been (ou en passe
de le devenir) plutôt qu’une super star qui, quoi qu’elle fasse, ne sera
jamais has-been (Di Caprio appartenant à cette catégorie dont l’incroyable
notoriété protège ad vitam aeternam de
ce risque).
En revanche, Tarantino, qui aime tant
éclater sa narration (il joue souvent de coupures brusques, de flash-backs, il
se plaît à croiser ses histoires, etc.), livre ici un récit assez linéaire qui accompagne
le rythme tranquille du film. Il se permet simplement quelques ellipses, pas toujours bien senties.
Le dernier grand
motif du réalisateur – la violence soudaine et crue qui
finit toujours par jaillir – est ici presqu’absent : Tarantino conserve malgré tout un moment où la violence explose, mais en le confinant à un final traité sur un mode exclusivement humoristique.
On est loin des éclatements de sang de Reservoir Dogs ou de Kill Bill, sans doute
parce que, le titre le dit bien, Tarantino nous livre sa version personnelle d’Hollywood,
celle d’un conte, rêvé et doux et qui a le charme un peu proustien du
souvenir. Nulle violence au premier degré n'y a sa place. A tel point que la violence ensanglantée et sordide qui a réellement sévi lors de l’assassinat de Sharon Tate est rejetée hors du film. Avec un certain cynisme d'ailleurs puisqu'elle est remplacée par une séquence comique.
Notons aussi que
c’est un retour au premier plan pour Brad Pitt dont la plastique mise à mal ces
derniers temps est redorée dans un rôle qui le met beaucoup en valeur. Cela dit
le personnage joué par Leonardo di Caprio est beaucoup plus
intéressant que celui de Brad Pitt. C’est peut-être là le regret du film :
on aurait aimé que Tarantino cesse un peu le parallèle entre les deux et se
concentre sur Rick Dalton, le personnage le plus épais, le plus complexe et,
finalement, celui qui évolue le plus au cours de l’histoire : voilà un personnage d'acteur qui ne
sait plus trop ce qu’il vaut, boit trop, s’en repent, fait ce qu’il peut,
pleure plusieurs fois, se reprend à nouveau et, finalement, incarne violemment
et métaphoriquement le personnage même qui l’a rendu célèbre, en carbonisant
virilement l'un des agresseurs.
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