vendredi 20 septembre 2019

Once Upon a Time in... Hollywood (Q. Tarantino, 2019)



Once Upon a Time in… Hollywood réussit le paradoxe d’être à la fois assez original pour un film de Quentin Tarantino et tout à fait typique de son style. En effet, des quatre motifs qui habitent souvent ses films, Once Upon a Time en contient deux jusqu’à plus soif et fait presque disparaître les deux autres.
Le premier motif sur lequel il se concentre est cette façon de raconter, assez lente et calme, avec peu d’actions, en se concentrant sur le trivial. Le film, alors, suit cette linéarité tranquille (qui confine parfois, au détour d’une séquence trop longue, à l’ennui) en accompagnant ses personnages, dans des moments qui ne sont pas décisifs (ou à peine), rallongés, où Tarantino se plait à côtoyer ses personnages. Ce travers célèbre rejoint par exemple les discussions sans fin, classiques du réalisateur, avec une narration qui ralentit terriblement et où Tarantino s’en remet à son talent de metteur en scène ou à l’humour pour faire passer le temps.
Second motif très présent : le cinéma de Tarantino reste résolument post-moderne, avec une intertextualité permanente, des citations, des jeux entre le cinéma et lui, entre les personnages et les acteurs, entre son style et celui qu’il cite. On notera par exemple l’amusant dénigrement du cinéma italien dont les westerns ont eu tant d’influence sur Tarantino lui-même. A ce titre, le choix de Di Caprio pour interpréter cet acteur qui devient progressivement has-been peut surprendre : il y a là un double fond qu’aurait pu travailler Tarantino en choisissant un acteur devenu has-been (ou en passe de le devenir) plutôt qu’une super star qui, quoi qu’elle fasse, ne sera jamais has-been (Di Caprio appartenant à cette catégorie dont l’incroyable notoriété protège ad vitam aeternam de ce risque).

En revanche, Tarantino, qui aime tant éclater sa narration (il joue souvent de coupures brusques, de flash-backs, il se plaît à croiser ses histoires, etc.), livre ici un récit assez linéaire qui accompagne le rythme tranquille du film. Il se permet simplement quelques ellipses, pas toujours bien senties.
Le dernier grand motif du réalisateur – la violence soudaine et crue qui finit toujours par jaillir – est ici presqu’absent : Tarantino conserve malgré tout un moment où  la violence explose, mais en le confinant à un final traité sur un mode exclusivement humoristique. On est loin des éclatements de sang de Reservoir Dogs ou de Kill Bill, sans doute parce que, le titre le dit bien, Tarantino nous livre sa version personnelle d’Hollywood, celle d’un conte, rêvé et doux et qui a le charme un peu proustien du souvenir. Nulle violence au premier degré n'y a sa place. A tel point que la violence ensanglantée et sordide qui a réellement sévi lors de l’assassinat de Sharon Tate est rejetée hors du film. Avec un certain cynisme d'ailleurs puisqu'elle est remplacée par une séquence comique.

Notons aussi que c’est un retour au premier plan pour Brad Pitt dont la plastique mise à mal ces derniers temps est redorée dans un rôle qui le met beaucoup en valeur. Cela dit le personnage joué par Leonardo di Caprio est beaucoup plus intéressant que celui de Brad Pitt. C’est peut-être là le regret du film : on aurait aimé que Tarantino cesse un peu le parallèle entre les deux et se concentre sur Rick Dalton, le personnage le plus épais, le plus complexe et, finalement, celui qui évolue le plus au cours de l’histoire : voilà un personnage d'acteur qui ne sait plus trop ce qu’il vaut, boit trop, s’en repent, fait ce qu’il peut, pleure plusieurs fois, se reprend à nouveau et, finalement, incarne violemment et métaphoriquement le personnage même qui l’a rendu célèbre, en carbonisant virilement l'un des agresseurs.


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