mercredi 19 janvier 2022

Le Syndicat du crime (Ying huang boon sik de J. Woo, 1986)





John Woo, avant de devenir un transfuge hasardeux à Hollywood, était le chef de file des cinéastes hongkongais spécialisés dans les films de gangsters violents et rythmés. Le Syndicat du crime est l’un de ses films les plus célèbres : Woo y installe de nombreux codes du genre qui feront florès.
Si le film est construit sur la trame classique des frères ennemis – un frère flic et l’autre mafieux – c’est bien sûr son style et son parti-pris esthétique que l’on retient.
Très maniériste, la mise en scène se délecte des scènes de combats où les uns et les autres (policiers contre gangsters ou gangsters entre eux) vident chargeurs sur chargeurs. John Woo prépare longuement ces moments d’explosion de violence puis il s’en donne à cœur joie : il multiplie les ralentis, les jeux de miroirs, les instants captés hors de l’action (un regard, un geste, un pigeon qui se pose) avant de reprendre son rythme effréné et de déchaîner la violence. Parfois, alors qu’il retient ses coups, les personnages se toisent, échangent un regard ou un mouvement coordonné, comme dans un duel de western : cela évoque le moment où tout est en suspens dans la séquence finale de La Horde sauvage – moment où tout est encore possible – avant qu’un détail ne la fasse basculer dans la violence.
Les corps sont criblés de balles, ils sont projetés sous les impacts, le sang éclabousse les murs, encore et encore. Bien entendu Woo laisse le réalisme de côté et il construit des motifs, par exemple les multiples impacts qui déchiquètent les corps ou encore cette façon qu’ont les tireurs, les bras tendus et un pistolet dans chaque main, de vider leurs chargeurs à tout-va.


Par définition John Woo en fait trop. Mais ce too much donne un style au film et, surtout, il est une façon de faire surgir le trop plein d’énergie des personnages. La narration, bien sûr, en prend un coup et raconte peu de choses, mais l’on reste toujours dans des motifs venus tout droit de Melville : celui des amitiés viriles, des codes d’honneur, des dettes qui se paieront.
John Woo emprunte à Hollywood (il n’y a qu’à voir Chow Yun-fat –  qui deviendra l’acteur fétiche de Woo et sera bientôt la superstar de Hong-Kong – mâchonner une cigarette comme Sterling Hayden dans Chasse au gang) et le lui rendra bientôt : Tarantino reprendra ce style tout en éclaboussures et en exagérations dans maintes scènes d’action.
Et John Woo, fort de son succès, reprendra son style et son acteur fétiche dans d’autres films du même acabit : Le Syndicat du crime 2, A toute épreuve et, surtout, The Killer.




Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire