samedi 13 septembre 2025

Larmes de clown (He Who Gets Slapped de V. Sjöström, 1924)

 



Grand film de Victor Sjöström où le monde est montré comme un gigantesque cirque impitoyable. Le héros trop vertueux est balayé par la cupidité et la trahison et il laisse bientôt sa place au clown sur lequel s’abattent les claques.
Et dans ce cirque impitoyable, plus les malheurs s’abattront, et plus le clown prendra de claques et plus il rira fort. Ce masque de clown qui fige le sourire là où il faudrait pleurer est porté, comme une évidence, par l’immense Lon Chaney, auquel le film doit beaucoup. Il annonce ses grands rôles – en particulier chez Tod Browning – avec cette expressivité magnifique, ces regards si perdus et si tristes d’où surgit, tout à coup, la folie. Folie inévitable qui vient, comme un exutoire, tout rattraper.
En montrant en plein cadre ce clown être humilié pour le divertissement des spectateurs, Victor Sjöström, sans sourciller et avec maestria, à grands coups de plans serrés et avec son montage au rythme parfait, tend un miroir sévère et sans concession vers les spectateurs.
On retrouvera évidemment des accents du film chez Browning (dans L’Inconnu ou, bien sûr, dans Freaks) avec cette ambiance foraine et cette horreur finale (où le père et le baron  sont dévorés par un lion).
On notera qu’il s’agit du premier film produit par la MGM, futur major et maillon essentiel de l’usine à rêves hollywoodienne depuis lors (à se demander d’ailleurs, comme un symbole, si ce n’est pas le lion de la MGM qui dévore les vilains du film et rétablit la morale) et l’on y croise, en plus de Lon Chaney, John Gilbert et surtout Norma Shearer, futures stars de la major.

 

jeudi 11 septembre 2025

Miroirs N°3 (C. Petzold, 2025)





Ce drame de Christian Petzold n’est guère convaincant : la première partie du film est très décevante (les personnages et les situations sont étonnamment caricaturales et sans âme) et, après l’accident qui lance le film, on comprend très vite le jeu trouble qui se noue entre Betty et Laura.
Le film, alors, qui se veut tout en ellipses et en non-dits, est cousu de fil blanc et rien ne se passe plus guère, ni à l’écran, ni entre les lignes, ni dans le cœur des personnages. L’arrivée du mari et du frère permettent de souffler un peu (les deux acteurs sont nettement plus convaincants) mais cela n’épaissit guère le récit (au moment de la révélation de la réalité de la situation par le frère à Laura, il y a bien longtemps que l’on a compris). Et si, formellement, le film se veut épuré, sa lenteur manque de poésie et l’ensemble reste très plat, sans ampleur ni humeur particulière.



mardi 9 septembre 2025

Gangsters (O. Marchal, 2002)

 


Dès ce premier long-métrage, Olivier Marchal cherche à plonger au sein de l’univers des policiers, entrant dans les bureaux et les quartiers généraux plutôt que de rester dans les rues, les banques ou les appartements des mafrats, comme le veut souvent le genre. Là il fouille les passes d’armes entre indics et inspecteurs fatigués, guettant les corruptions et les magouilles, les petits arrangements et les grandes traîtrises.
Si le film souffre d’un scénario assez simple et d’une réalisation basique, il bénéficie en revanche du charisme de Richard Anconina (dont le personnage reste longtemps impénétrable) et l’ensemble, avec son cortège de flics usés ou blasés, est assez efficace.

 

vendredi 5 septembre 2025

L'Invité du mardi (J. Deval, 1950)

 



Drame assez convenu articulé autour d’un scénario classique avec le coup monté par la femme et l’amant à l’encontre du mari. Mais, malgré quelques bonnes séquences (notamment celle, clef, du moment où le mari trompé comprend tout) la sauce ne prend guère : l’ensemble est cousu de fil blanc et le rythme n’est guère trépidant.
Bernard Blier est assez peu à l’aise en mari banal, pantouflard et sans passion, mais il retrouve toute sa facilité habituelle en deuxième partie de film, après cette fameuse séquence où il comprend tout et où l’intrigue, pour un moment, se noue.

 

mardi 2 septembre 2025

In the Cut (J. Campion, 2003)





Jane Campion, très fidèle à son style, quitte le mélodrame pour aller voir du côté du thriller, mêlant les hésitations sentimentales de Franny Averey avec une enquête autour d’un tueur qui sévit.
Si l’enquête en elle-même est assez simpliste (mais là n’est pas ce qui intéresse réellement la réalisatrice), c’est le personnage de Franny, très bien servi par une excellente Meg Rayan, qui est au cœur du film, de même que cette atmosphère très bien saisie par Campion qui mêle lenteur et détours et qui baigne dans une lumière sombre splendide (la photo, par moment, est incroyable).
On pardonne donc l’intrigue un peu superficielle et même artificiellement trompeuse (et qui laisse notamment croire que l’inspecteur Malloy est coupable, rendant le personnage faussement trouble) pour se laisser prendre par cette histoire érotico-sentimentale joliment filmée.


samedi 30 août 2025

L'Esclave (Y. Ciampi, 1953)

 



Surprenant film où les thèmes de la drogue, de l’addiction et de la déchéance sociale sont traités directement. Le film n’explore pas les bas-fonds des drogués mais bien plutôt le monde du spectacle avec la dérive progressive de son personnage, emporté par une addiction dont il ne parvient pas à se défaire. En prenant appui sur un accident et une dépendance grandissante à la morphine, le scénario exonère en partie moralement son personnage. Daniel Gelin campe parfaitement ce rôle pas si simple, mettant à mal sa plastique et sa prestance de jeune premier (même si l’on sait qu’il n’hésite pas à jouer des rôles variés, y compris ceux de salauds, comme dans La Neige était sale).

Dans les mêmes années, Hollywood traite du sujet de l’alcoolisme dans Le Poison et il dénoncera bientôt les ravages de la drogue dans L’Homme au bras d’or (sans compter des films précurseurs pré-code comme Héros à vendre) mais, en France, L’Esclave – le titre du film résumant très bien ce qui se joue et qui est dénoncé – est un film isolé et assez unique sur ce thème.

 

lundi 25 août 2025

Jurassic World : Renaissance (Jurassic World Rebirth de G. Edwards, 2025)

 



De même que l’on ne change pas une équipe qui gagne, on n’arrête pas l’exploitation d’un filon qui donne encore. Hollywood, suivant ce mantra puissant et incontournable, a bien vite ressorti ses dinosaures, trois ans après avoir laissé penser (mais qui pouvait le croire) que la série allait s’arrêter.
Sans bien sûr rien apporter d’original, sans renouveler la série, le film, cependant, est moins catastrophique que les précédents et il cherche à revenir vers les tout débuts, du temps de Spielberg (Le Monde perdu, notamment). C’est bien insuffisant, évidemment, pour tenir en haleine et suivre ce film autrement que l’œil fatigué et l’esprit lassé par tant de banalités (même si le choc visuel – qui présidait au succès immense du premier Jurassic Park – est toujours présent, avec des monstres visuellement incroyables (hormis le tout dernier à apparaître, qui va lorgner bêtement du côté d’Alien 4)).



samedi 23 août 2025

Treize jours (Thirteen Days de R. Donaldson, 2000)

 



Treize jours n’a pas beaucoup d’autre ambition que de raconter par le menu la crise de Cuba en plongeant aux côtés des JFK et de ses proches.
Bien sûr il ne s’agit pas d’un grand film historique, qui aurait l’ambition d’un souffle épique ou bien qui foncerait à l’intérieur du crâne des personnages pour les sonder. On suit ici simplement les étapes de cette crise – on mesure combien l’étincelle qui met le feu aux poudres faillit, à plusieurs reprises, tout enflammer – mais cela donne au film une dimension didactique qu’il ne quitte guère : c’est tout à fait intéressant (avec des acteurs qui, tranquillement, font le job) même si cela réduit beaucoup la dimension du film.



jeudi 21 août 2025

Le Grand Bain (G. Lellouche, 2018)

 



Le premier film de Gilles Lellouche derrière la caméra est plutôt réussi : il plonge au milieu d’un groupe de quadra et quinquagénaires en crise (et c’est toute la masculinité qui est en crise avec eux) où il n’y en a pas un pour rattraper l’autre. Pathétiques, parfois pitoyables, les personnages s’accrochent aux branches pour ne pas sombrer, chacun étant embourbé dans une situation, une déprime ou un complexe qui le tire vers le fond. C’est la camaraderie qui va les sauver, avec un final à ce point improbable (et c’est bien dommage, d’ailleurs) qu’il donne presque une coloration de conte au film.
Mais l’ensemble est sans concessions et reste assez drôle – le groupe d’acteurs fonctionnant bien – avec quelques bonnes séquences et des réparties parfois savoureuses (on pense à Virginie Efira assise sur le plongeoir d’où elle assène du Verlaine à sa troupe de bras cassés).


mardi 19 août 2025

A bout portant (F. Cavayé, 2010)

 



Thriller d’action qui se veut trépidant mais qui est surtout très convenu avec des figures archétypales dont le film ne sort pas. Entre l’innocent embarqué malgré lui, le méchant blessé qui s’amende au cours du film ou le flic ripoux qui devient le vrai méchant, il n’y a là rien de bien passionnant. Si l’on ajoute au style exubérant des aberrations scénaristiques pénibles (un exemple parmi tant d’autres : le malfrat pourtant à l’article de la mort et suivi en soins intensifs qui court à travers Paris quelques heures plus tard), on comprend alors que le film de Fred Cavayé fatigue bien plus qu’il n’emporte.


mardi 12 août 2025

Aaltra (B. Delépine et G. Kervern, 2004)

 



Road movie improbable et très corrosif, déversant un regard au vitriol comme peu de films ont pu le faire ces dernières années, Aaltra est une réussite.
L'on suit intrigué ce voyage à la fois noir, délirant et en partie mutique avec ces deux protagonistes handicapés. La présence de Benoît Poelvoorde vient comme valider cet équilibre, lui qui incarne si bien ce mélange tragi-comique, cette crète étroite entre le rire et le sordide. Le rythme est un peu décousu mais le ton est là : entre comédie et noirceur profonde, il est la vraie réussite du film, qui part d’un rire amer, passe par la tristesse pour filer jusqu’au glauque.


jeudi 7 août 2025

Bad Taste (P. Jackson, 1987)

 



Peter Jackson, avant de connaître la gloire avec sa trilogie du Seigneur des anneaux, était déjà très connu par les fans de gore : ses premiers films sont devenus des références du genre, en particulier Braindead. Et, dans cette lignée, Bad Taste, sa toute première réalisation, constitue aujourd’hui un film culte.
Il n' s'qagit pourtant que d'une série Z horrifique largement oubliable où le réalisateur promène ses personnages au milieu d’ennemis zombiesques qui sont des extra-terrestres ayant pris (en début de film tout du moins) figure humaine et qui déchiquettent et dévorent des humains à tout va.
Le scénario est alors le prétexte pour un déferlement de sang et de giclures d’organes, au milieu d’un déversement de vomi ou de membres arrachés, le tout avec force détails horrifiques. Tout cela n’a pas grand sens même si le second degré et l'humour gore sont présents partout (et sont une volonté nette du réalisateur, même s'ils se conjuguent avec les petits moyens financiers qui contraignent forcèment le film). Cela dit, même si certains adorent et si le film a sa cohorte de fans, on peut aussi rester navré devant ce spectacle assez vain.


mardi 5 août 2025

Les Infidèles (E. Bercot, A. Cavayé, M. Hazanavicius, G. Lellouche, 2012)

 



Amusant film à sketchs qui renvoie, par bien des aspects, à Parlons femmes de Risi. On y retrouve le même plaisir potache de tirer à boulets rouges sur les personnages de dragueurs lourds, persuadés d’eux-mêmes, ou sur les dragueurs compulsifs ou incapables, brassant un peu les couches sociales et n’hésitant pas (mais c’est bien dommage) à aller vers le gore un peu trash par moment.
Bien sûr les sketchs sont inégaux mais Jean Dujardin et Gilles Lelouch s’en donnent à cœur joie et ils prennent un plaisir manifeste à se grimer, à coup de coiffures improbables ou de styles variés, un peu comme le faisait Vittorio Gassman chez Risi.
On notera dans le sketch La Bonne conscience combien Jean Dujardin est capable de très bien jouer le beauf incapable dont les ratées et les frustrations renvoient immédiatement à une vie glauque et vaine. Ce jeu, que l'on retrouvera notamment dans I Feel Good, est une vraie réussite de l’acteur qui parvient alors à osciller du comique au pathétique en un instant (un peu à la manière de Benoît Poelvoorde).

 

samedi 2 août 2025

Eyes Wide Shut (S. Kubrick, 1999)

 



Dernier film de Stanley Kubrick, arrivant quelques treize ans après Full Metal Jacket – et il était à ce titre très attendu à sa sortie – et qui est, par son thème et sa manière de faire, très surprenant. En effet le réalisateur met en scène le couple et, par là même, filme les émotions qui traversent les personnages. Or Kubrick, le plus souvent, ne cherche pas à émouvoir (même s'il y a, bien entendu, dans son oeuvre, des personnages émouvants, dans Lolita par exemple, ou des séquences émouvantes, comme la toute fin des Sentiers de la gloire ou la mort de HAL dans 2001). Mais Kubrick reste, très largement, un réalisateur cérébral. Ici il prend donc le contre-pied de sa tendance habituelle. Ainsi il emmène ses deux personnages vers un moment de crise, avec la révélation par Alice de son fantasme, révélation à la quelle répondra bientôt une errance de Bill dans les rues.
Mais ensuite Kubrick va rester très habilement sur l'étroite crête de l'incertitude : on ne sait trop si ce que vit Bill est réellement vécu ou s'il s'agit, pour lui aussi, de fantasmes. Encore que les indices s'accumulent et, très probablement, tout cela est fantasmé par Bill alors qu'il est prostré dans son taxi, parcourant les rues de New-York. C'est que Bill, dès lors qu'il ressort de chez lui pour aller voir un patient décédé, juste après la scène de la révélation du fantasme d'Alice, ne cesse de rencontrer, dans une succession de scènes, des femmes qui l'abordent, le veulent, le tentent. Le point d'orgue de cette enchaînement étant bien sûr la scène d'orgie qui a tout d'une séquence rêvée. Et, même si elle pourrait se dérouler, telle qu'elle est montrée, autour du rite d'une secte, elle est filmée de façon très onirique, et Bill, comme dans un rêve, justement, regarde mais n'agit pas.
La fin, d'ailleurs, après les explications de Ziegler, contribue à lever le doute. Bill se retrouve en famille, dans un magasin de jouets, et, à ce moment, ses questionnements ne concernent plus que son couple et ses interrogations de la veille (avec en point culminant la mort de la prostituée) sont complètement évacuées. Précisément comme si Bill était sorti de son rêve et revenait à la réalité simple (mais dure) de son couple.
On notera que la nouvelle dont s'inspire Kubrick – La Nouvelle rêvée d'Arthur Schnitzler –ne laisse, de son côté, guère de doute, quant à ce mélange entre réalité et fiction. Après Shining qui explorait la folie de Torrence qui venait torpiller sa famille, on retrouve alors, dans une volonté beaucoup plus brûlante et moins folle, cette volonté d'explorer l'intérieur d'un crâne : ici celui de Bill, envahi par le doute et l'image de sa femme le trompant.


lundi 28 juillet 2025

Near Death Experience (B. Delépine et G. Kervern, 2014)

 



Near Death Experience, film très dépouillé et minimaliste dans sa forme, joue avec l’image de Houellebecq en reclus, loin du monde et de ses fureurs. Mais, étonnamment pour les réalisateurs Delépine et Kervern qui ne sont pas coutumiers du fait, le film semble bien prétentieux : comme si les réalisateurs espéraient que images proposées, accompagnées de la voix off, allaient se lever et parler d’universalité, comme si Paul pouvait avoir une puissance qui le dépasse et nous parle. Pourtant non, entre la voix off volontairement atone et banale et la nature filmée au plus près, l’équilibre ne se fait pas. La nature est arpentée mais elle ne surgit pas à l’écran, les paysages ne deviennent rien d’autre qu’eux-mêmes (ils ne sont pas un ailleurs, ni un rêve, ni un autre monde), la voix n’emporte pas le spectateur mais elle le coince dans un misérabilisme décevant. Et ce ne sont pas les accents très houellebecqiens des dialogues (qui ne sont pourtant pas de lui) ni la collusion très étroite entre Paul et l’écrivain/acteur qui peuvent faire décoller réellement le film.
Film qui manque aussi de cet humour grinçant et parfois très noir que les réalisateurs savent d'ordinaire si bien utiliser (da Aaltra à I Feel Good en passant par Mammuth). Là les choses, plus sérieuses, deviennent prétentieuses et tout tombe à plat.


mercredi 23 juillet 2025

Les Gorilles (T. Aurouet, 2015)


 


Affligeante comédie, pénible et sans âme. Le film reprend les codes du buddy movie mais il se saborde d’emblée : si le genre s’amuse à assembler des personnages mal assortis, ils n’en restent pas moins issus du même genre (que l’on se souvienne de L’Arme fatale). Ici le duo est construit entre un personnage complètement issu de la comédie (et même de la comédie la plus lourde et la plus caricaturale) et un autre qui, lui, refuse la comédie et reste dans le drame (avec, là aussi, toute la lourdeur possible, Joey Starr surjouant sans cesse).
Evidemment rien n’est crédible dans ce qui se déroule sous nos yeux et, surtout, rien n’est drôle, tout est éprouvant, mal joué, forcé, sans rythme, sans rien sentir de ce qu’est une comédie, le film cherchant simplement à surfer sur la notoriété (toute relative) des acteurs. Manu Payet, qui s’agite sans cesse et qui se rêve en vis comique, est l’élément le plus difficilement supportable du film et, malheureusement, il est de tous les plans.

 

lundi 21 juillet 2025

Holy Smoke (J. Campion, 1999)

 



Film bien décevant de Jane Campion qui reste empêtré dans la relation un peu malsaine et étrange (mais surtout très inintéressante) entre Ruth, adepte de son gourou, et Waters, qui veut l’exorciser. Bien sûr cette relation se complexifie (on s’en doutait), mais sans déboucher sur rien de bien passionnant (malgré le duo d'acteurs stars). Et, bien plus que ce scénario basique, c’est la forme même qui est décevante, Campion ne parvenant pas à donner au film cette patte particulière qu’elle met si souvent, à demi-poétique et à demi-contemplative. Ici, alors que l’occasion s’y prêtait – avec cette baraque perdue dans le désert – Campion semble sans inspiration, sans cette photo splendide qui accompagne souvent ses réalisations et sans parvenir, finalement, à donner à son film une humeur particulière.

 

vendredi 18 juillet 2025

L'Amour ouf (G. Lallouche, 2024)

 



Cette réussite en termes de spectateurs (plus de quatre millions d’entrées) est pourtant très quelconque et elle déçoit beaucoup. La première partie passe sans doute davantage (lorsque les protagonistes oscillent entre l’adolescence et le début de l’âge adulte, avec des acteurs intéressants), mais le film reste très lourd, tout étant surchargé, peint avec un pinceau beaucoup trop appuyé et insistant.
L’Amour ouf, alors, qui se veut une sorte de saga sur quinze ans, ne surprend guère, chaque personnage suivant impeccablement la destinée esquissée dans la première partie. On sait que Clotaire et Jackie se retrouveront, que Clotaire basculera de la petite à la grande délinquance, qu’il ira en prison, en sortira, s’amendera, etc. Tout est compris aussitôt, il n’y a là rien de surprenant, les acteurs faisant tranquillement leur job.
Gilles Lellouche cherche à donner du style à cette matière mais il s’épuise en jeux de caméras et autres effets, sans parvenir à épaissir son histoire ou ses personnages qui restent prévisibles et très peu épais. On notera quand même avec amusement que le film cite nettement Le Parrain ou Les Affranchis au détour de quelques séquences (reprenant notamment la légendaire entrée au Copacabana).
On retiendra également la séquence initiale, à laquelle renvoie la fin du film. Cette séquence en flash-forward, finalement, ne sera pas vécue par le protagoniste et elle apparaît donc comme une séquence fantastique, qui aurait pu se produire mais ne s’est pas produite (et qui fait faussement dévier le personnage : on s'attendait évidemment à cette rédemption). Bien sûr les ficelles sont grosses et naïves (c’est l’amour qui sauve Clotaire) mais ce destin tragique et violent qui sera démenti est une forme de chausse-trappe pour le spectateur qui ne peut s’attendre à cette touche de fantastique dans un film par ailleurs assez réaliste. Cela donne l’impression (amusante mais un peu bancale) que, finalement, après-coup, alors que le film est commencé, la fin en est changée.


mercredi 16 juillet 2025

Les Granges brûlées (J. Chapot, 1973)

 



Film bien terne mettant un juge (Alain Delon) aux prises avec un meurtre perpétré aux abords d’une ferme tenue par une femme forte et intègre (Rose, campée par Simone Signoret).
Le film joue de l’opposition entre ces deux personnalités, mais l’on n’est guère emporté, la situation restant longtemps figée et, finalement, tout le monde a raison. En effet la personnalité de Rose nous incite à croire en son innocence et le juge, malgré les indices qui vont dans un autre sens, le pense aussi : ce sera le cas. L’entourloupe finale sur les coupables ne convainc guère et sert juste à faire retomber maladroitement le scénario sur ses pieds.
Fixé sur ses deux stars, Jean Chapot oublie peut-être le troisième élément central du film : le décor enneigé du Jura en hiver, le froid qui gèle et recouvre tout, la dureté de la vie dans ces hameaux perdus et le juge citadin qui débarque et vient se cogner contre ce monde paysan. Il y avait peut-être là une humeur à capter qui n’a pas intéressé le réalisateur.

 

samedi 12 juillet 2025

La Vache (Gāv de D. Mehrjui, 1969)

 



Important et novateur film iranien qui prend des accents néoréalistes par sa description du quotidien et sa façon de plonger au cœur du village. Mais le film s’en éloigne presqu’aussitôt par son étrangeté et son dénouement avec cet homme frappé de folie qui, ne pouvant affronter la réalité, se prend pour une vache.
Cette fin dure, sombre et sans issue frappe le film d’une puissance marquante : l’on comprend l’influence qu’il a pu avoir en Iran, autant par son regard néoréaliste que par son humeur poétique et tragique.

 

jeudi 10 juillet 2025

Le Filmeur (A. Cavalier, 2005)

 



Consistant en un montage en forme de collage de vidéos prises sur le vif par Alain Cavalier au fil des ans (un peu comme une sorte de journal filmé), l’ensemble forme un film qui saisit sur le vif tantôt des moments très personnels – et parfois tout à fait quelconques –, tantôt des moments curieux, un peu poétiques ou décalés. L’ensemble forme une expérience qui renvoie à d’autres films (comme ceux de Jonas Mekas) et procède d’une création expérimentale. Chacun sera alors sensible à l’humeur générale qui émerge de l’ensemble ou bien à des séquences très belles qui ressortent ou bien sera un peu interloqué de voir ces séquences quotidiennes parfois banales mises bout à bout.

 

lundi 7 juillet 2025

Gladiator 2 (R. Scott, 2024)

 



On a beau connaître Hollywood, on a du mal à s’y faire. Le très bon Gladiator de Ridley Scott se suffisait à lui-même et il était un beau fleuron du péplum au début des années 2000, revitalisant étonnamment un genre alors passé de mode.
Las, Hollywood n’a pu s’en empêcher et il est allé chercher sa suite, cherchant à exploiter le filon, quelques vingt-quatre années plus tard. Ridley Scott, une nouvelle fois (après Prometheus qui venait plus de trente ans après Alien), est aux manettes et il déçoit comme si souvent (on est toujours surpris de l’écart de qualité entre ses plus grandes réussites et d’autres de ses films, tout à fait médiocres). Il s’ensuit un film lourd, sans saveur, convenu, s’appliquant à suivre les règles des blockbusters sans chercher autre chose que le recyclage et la surenchère sans âme. Tout ce qui faisait la réussite du premier film est passé aux oubliettes. C’est bien dommage : désormais, quand on parlera de Gladiator, il faudra toujours préciser, pour se prémunir, « le premier », tant il ne faudra pas confondre avec ce Gladiator « deux » mauvais et oubliable.


jeudi 3 juillet 2025

Le Miraculé (J.- P. Mocky, 1987)

 



Comédie assez lourde de Jean-Pierre Mocky qui s’attaque avec ses gros sabots non pas tant à l’Église elle-même qu’à sa déclinaison mercantile et intéressée autour de Lourdes.
Mais cette histoire d’arnaque à l’assurance sur fond de miracle n’est guère convaincante. Il n’y a guère que Jean Poiret qui retienne l'attention : en campant le rôle central de Papu, il sort de ses rôles habituels (ceux de personnages policés ou raffinés) pour incarner un chiffonnier magouilleur, hâbleur et vulgaire. Mais, en dehors de sa prestation, le film accumule des situations ou des gags entendus ou quelconques. Pourtant la chute finale, bien qu’attendue, est réussie et elle rétablit au moins en partie l’Église (ce qui est, pour le coup, est une surprise, venant de Mocky).


vendredi 27 juin 2025

Zoulou (Zulu de C. R. Endfield, 1964)

 

Dans une sorte de Fort Alamo anglais, le film montre l’improbable résistance de combattants anglais assaillis par une déferlante de guerriers zoulous. Zoulou s’appuie sur la trame historique des évènements (la bataille d’Isandhlwana en Afrique du Sud, en 1879) et cherche à montrer la glorieuse résistance anglaise (une centaine de défenseurs face à quatre mille assaillants).
Comme tous les films mettant en scène un grand nombre de figurants, Zoulou est focalisé sur quelques combattants anglais dont beaucoup ne souhaitent pas se battre (des malades, des cuisiniers, etc.). Et Cyril Endfield s’attarde sur quelques officiers qui encadrent tant bien que mal les troupes et qui sont très bien campés, avec notamment un très bon Michael Caine (dont c’est le premier grand rôle).
Le film, après une longue introduction, peut se résumer à une énorme séquence de bataille, très bien mise en scène. Dès lors le film se résume à son genre : il faut aimer ces grandes batailles pour être sensible à ce film efficace et spectaculaire.
L’image finale est emplie du respect des guerriers zoulous pour le courage de leurs adversaires qui ont tenu bon (image que l’on retrouvera à la toute fin de La Proie nue).


mercredi 25 juin 2025

Pretty Woman (G. Marshall, 1990)

 



Cette comédie romantique sans prétention est un des grands succès américains des années 90 (propulsant immédiatement Julia Roberts au rang de superstar). Pourtant le film est assez quelconque, l’histoire consistant en une adaptation de Cendrillon dans l’Amérique des années 90. Très convenu et sans surprise, avec des personnages sans épaisseurs et volontiers caricaturaux (on pense à l’avocat d'Edward), le film s’en remet au charisme du duo d’acteurs.
Mais le cinéma entre en résonnance avec la société de telle sorte que des films, parfois, quand bien même ils sont quelconques, débordent de la salle du cinéma et entrent dans la culture populaire : il en est ainsi de Pretty Woman – sans doute parce qu’il reprend le mythe de Cendrillon tout en jouant avec l’image de l’homme d’affaire cynique – qui est devenu, au fil des ans, un film culte.

 

lundi 23 juin 2025

Domino : La Guerre silencieuse (Domino de B. De Palma, 2019)

 



Ce dernier film de Brian De Palma est très décevant : très quelconque, sans âme, sans les traits stylistiques habituels du réalisateur, sans apporter rien formellement et n’ayant rien à dire (ce micmac entre terroristes, policiers et CIA est très banale et sans grand intérêt), il y a peu de choses qui sauvent le film.
Même des moments où la maestria de De Palma aurait pu s’exprimer sont d’une banalité qui mettent mal à l’aise : on pense à la tentative terroriste en fin de film, autour des arènes d’Almeria, avec son montage alterné multiple mais qui tombe à plat. On est loin des split-screens délirants du Phantom of the Paradise ou même des séquences appliquées de Femme fatale, pour citer un exemple plus récent et moins exubérant. Sans budget, sans inspiration, on est bien désolé de voir De Palma terminer sa carrière sur ce film oubliable et sans grand intérêt.


samedi 21 juin 2025

La Nuit (La notte de M. Antonioni, 1961)




Très typique de Michelangelo Antonioni, le film cherche à capter la désunion du couple Giovanni et Lidia (Marcello Mastroianni et Jeanne Moreau), qui se parlent de moins en moins, s’éloignent au fur et à mesure que la nuit passe, ne partagent plus les choses et, finalement, sont peut-être destinés à se perdre.
Au-delà des rencontres et des drames (la mort de leur ami en début de film), le propos du film est l’incommunicabilité, l’un des grands thèmes d’Antonioni, incommunicabilité qui est au centre de cette nuit et, avec elle, le vide, la solitude, l’errance. Le film expose une modernité de vie – entre soirée chic et cocktail – à laquelle s’oppose les deux personnages, vides, fatigués, sans projets, de plus en plus inconsistants. Alors que le monde se transforme et avance, nous dit Antonioni, les êtres s’épuisent et se perdent. La fin incertaine laisse au spectateur – ou à l’incertitude de la vie – la possibilité de réunir ou d’achever de désunir Giovanni et Lidia.



samedi 14 juin 2025

La Motocyclette (The Girl on a Motorcycle de J. Cardiff, 1968)

 



Un peu psychédélique, un peu road-movie, ce film un peu étrange (mais peu passionnant) a néanmoins une originalité, avec cette femme qui se veut libre et qui chevauche sa moto. Mais cette originalité ancre le film dans une époque et le date terriblement. Et l’ensemble est bien fade, avec les longs monologues sans reliefs qui accompagnent le trajet de Rebecca.
On notera le rôle d’Alain Delon qui correspond tout à fait à ce qu’il voulait éviter : celui d’un beau gosse fait tomber les femmes sous son charme. C’est ce prototype de personnage (de même que celui que l’on voit dans un sketch de La Rolls-Royce jaune par exemple) auquel il tournera très vite le dos pour ne plus y revenir.



mercredi 11 juin 2025

Un condé (Y. Boisset, 1970)

 



Très intéressant polar français qui démarre sur des bases assez classiques mais dérive rapidement avec l’entrée en scène de Favenin, flic qui évolue comme un électron libre et cherche à venger son ami.
Michel Bouquet, le regard fermé et la bouche pincé, est impeccable dans cet inspecteur impitoyable et que rien n’arrêtera. La manière dont il tue le meurtrier de son ami est remarquable : « tirer sur homme désarmer ça s’appelle un assassinat » se défend Michel Constantin ; « alors ce sera un assassinat » répond sèchement Michel Bouquet avant de vider son chargeur.
Si Boisset, au travers de ce personnage sans limite, reprend les gros pinceaux souvent malhabiles avec lesquels il peint habituellement les situations qu’il dénonce, ici le personnage dépasse le propos politique (la dénonciation des méthodes policières, qui a valu au film des interdictions) et détonne au milieu d’un cadre par ailleurs très conventionnel. De sorte que le sujet du film n’est plus une quelconque dénonciation mais bien plus le personnage en lui-même, ce qu’il est, ce qu’il fait.
Cet inspecteur Favenin apparaît alors comme une sorte d’inspecteur Harry avant l’heure, en version française et jusqu’au-boutiste. Loin de l’imagerie cartoonesque de super-héros de Dirty Harry et de sa dégaine légendaire avec costume, lunettes de soleil et flingue gigantesque (l’allure de Michel Bouquet engoncé dans son imperméable n’étant pas précisément celle de l’ami Eastwood), il y a pourtant de nombreux gènes communs entre les deux flics : rejetés par leur hiérarchie et rejetant eux-mêmes le système, ils évoluent en marge des manières de faire, avec une version très personnelle de la justice, dégainant à tout va et, finalement, l’un jettera son étoile quand l’autre démissionnera. On s’amuse de voir que le flic de Boisset va plus loin que celui de Don Siegel en franchissant largement et sans coup férir la ligne rouge. Et, même, dans le deuxième opus de l’inspecteur Harry (Magnum Force), celui-cicombat de jeunes flics allant plus loin encore que Dirty Harry : ils appliquent en fait les méthodes radicales de Favenin.

 

samedi 7 juin 2025

L'Etrange Monsieur Victor (J. Grémillon, 1938)

 



Drame assez classique qui déroule sans beaucoup d’énergie sa petite intrigue. Les ressorts ne surprennent guère et le personnage de monsieur Victor est parfois bien peu crédible (en jeune père notamment).
Néanmoins le film se suit sans déplaisir : il reste bien sûr l’exotisme de la période (comme un César à l’humeur dramatique où l’on croise des voyous) et le grand plaisir de quelques tirades énervées et truculentes de Raimu dont la puissance de jeu à l’écran est un ravissement permanent.


vendredi 6 juin 2025

Conclave (E. Berger, 2024)

 



Avec application mais sans grand génie, Edward Berger nous fait plonger dans les arcanes d’un conclave, entraînant le spectateur du côté de l’hors-champ, dans le secret des votes, des discussions, des confessions et, bien sûr, des scandales. C’est que, scénario oblige, il faut bien qu’il se passe quelques rebondissements pour tenir en haleine le spectateur, et l’on suit alors les différents fils de l’intrigue qui se déroulent peu à peu. Néanmoins tout cela apparaît un peu facile (les différents prétendants sont écartés tour à tour) et la dernière révélation fatigue par le sentiment de céder à nouveau aux sirènes de la bien-pensance.
On regrette que l’intention du réalisateur ne soit pas dans un contemplatif sacré et qu’il évacue toute la dimension mystérieuse que peut avoir un conclave : l’esprit saint aurait pu roder en ces lieux saints. Il n’y a pas le moindre mystère, pas la moindre émotion, on ne sort jamais des tractations et des calculs. On imagine la puissance visuelle qu’aurait pu instiller un grand créateur d’images (sans parler du décor éminemment prodigieux et spirituel de la chapelle Sixtine).
Cette réserve dite, on notera l’habileté du réalisateur à ménager l’Eglise tout en l’attaquant. Il y a certes des secrets scandaleux qui sont révélés, mais un très bon Ralph Fiennes compose un camerlingue qui se révèle intègre, affable et qui fait ce qu’il peut avec toute sa foi qui le porte. De même le cardinal finalement élu (dont une partie de la trajectoire rappelle celle qui a présidé à l'élection du Pape François) prêche la bonne parole et s’avère bien loin de toute l’agitation arriviste et calculatrice de beaucoup d’autres.

 

mercredi 4 juin 2025

MR 73 (O. Marchal, 2008)

 



Olivier Marchal signe un nouveau polar dépressif, qui fait déambuler ses personnages au travers d’un système corrompu et poussif, avec des flics usés, des ripoux violents et des supérieurs qui font ce qu’ils peuvent pour cacher la misère du monde. Tout ce petit monde déambule de scènes d’horreur en scènes d’horreur, ne parvenant jamais à s’extirper du sordide, bien au contraire : le film montre combien, petit à petit, les horreurs du monde finissent par contaminer les flics qui ou bien sombrent peu à peu, ou bien basculent du côté obscur.
L’ensemble de ces polars (on pense au précédent Gangsters et à 36 quai des Orfèvres) donne une vision très noire et ô combien pessimiste sur l’univers des policiers et, au-delà, sur la société elle-même, Marchal ne distillant dans ces films à peu près aucune énergie positive.

 

lundi 2 juin 2025

Le Mataf (S. Leroy, 1973)





Intéressant polar de Serge Leroy qui, sans être original, s’appuie sur des solides seconds rôles du cinéma (Michel Constantin, Georges Géret ou Adolfo Celi). Le film joue habilement des chausse-trappes dans lesquels viennent s’empêtrer Bernard Solville et ses amis.
Le film vaut pour son ambiance et ses jeux d’acteurs qui construisent toute cette atmosphère typique du cinéma français d'alors qui a marqué les esprits et rend très bien encore aujourd’hui.

 

jeudi 29 mai 2025

Snake Eyes (Dangerous Game de A. Ferrara, 1993)

 




Mise en abyme complexe, Dangerous Game évoque le tournage d’un film par le réalisateur Eddie Israel (impeccable Harvey Keitel, à la fois habité et fébrile, comme il sait si bien le jouer) dont le sujet est la rupture complexe d’un couple. Madonna est très bien aussi dans le rôle de cette actrice paumée qui fait ce qu’elle peut, coincée entre les foudres de son partenaire et le réalisateur.
La situation, les acteurs, le tournage puis le tournage dans le tournage s’entremêlent et tendent un miroir à Ferrara avec Eddie qui est son alter-ego. Ferrara montre ainsi combien sa réalisation est imbriquée dans sa vie. Il ne voit pas son métier comme un technicien ou un artisan mais bien comme un artiste, rejoignant là une position très peu américaine (où le réalisateur n’est qu’un maillon d’une chaîne) mais bien plus européenne (la politique des auteurs chère à la Nouvelle Vague). Un film, nous dit Ferrara, est la création d’un créateur.
Mais Ferrara montre aussi combien les acteurs eux-mêmes confondent ce qu’ils sont avec leurs personnages, en une fusion où le cinéma et la vie, finalement, ne font qu’un. « Le cinéma est plus important que la vie » disait Truffaut dans La Nuit américaine, chez Ferrara l’un et l’autre se confondent. Et la fin très habile achève de convaincre le spectateur que si le tournage s’arrête, la folie qui se développait sur le plateau, elle, ne s’arrête pas.


lundi 26 mai 2025

Le Cri (Il grido de M. Antonioni, 1957)

 



Ce film au relent très néoréaliste montre l’errance de Aldo, qui, sa femme ne l’aimant plus, part et ne sait où aller, de petits boulots en rencontres. Michelangelo Antonioni suit Aldo qui tourne en rond dans ce paysage vide et plat, alors que, de rencontres avortées en déceptions, il est de plus en plus seul, incapable de reconstruire quelque chose.
Antonioni capte très bien ces fausses rencontres, ces fausses avancées, ce monde vide pour un homme vide. La fin tragique exprime puissamment les pensées profondes du personnage.
Précédent L’Avventura et sa radicalité révolutionnaire, Antonioni, dans Le Cri, prend au néoréalisme et y mêle les thèmes (la solitude, l’errance) et les motifs (des paysages géométriques et vides) qui lui sont déjà chers et qu’il déploiera de façon systématique et presqu’abstraite par la suite.


vendredi 23 mai 2025

Ho ! (R. Enrico, 1968)

 



Curieux film de Robert Enrico, valant surtout pour le jeu qui tourne autour du personnage joué par Jean-Paul Belmondo. En début de film ce personnage est volontiers ridiculisé et moqué et il apparait faible et dépassé. Il se rebiffe ensuite mais sans y parvenir réellement, en continuant de se laisser emporter par les évènements alors qu’il voudrait les contrôler. On est là très loin des personnages joués par celui qui sera bientôt Bebel. Ce rôle apparaît ainsi comme une vraie originalité.
Mais, hormis cette singularité qui lui donne aujourd’hui un intérêt, le film manque de relief et reste loin des plus grandes réussites du réalisateur.